Je peux comprendre la volonté de Seb et de Greg de progresser, et d'afficher de bons résultats. Les meilleurs à ce petit jeu travaillent beaucoup et ont beaucoup d'expérience, même sur des "petits" vins. Ce n'est pas vraiment la philosophie des Vinosophes. Je pense qu'on privilégie aujourd'hui davantage le plaisir que la soif de connaissance ou de reconnaissance. Ceci est peut-être du au fait que nous vieillissons tous.
Greg, il n'y a pas de mal à être compétiteur, je crois que c'est normal, quand on veut progresser dans sa connaissance. J'ai eu cette période moi aussi, à un moment.
Mais la recherche de la notoriété ne doit pas être le moteur de notre rapport au vin. C'est idiot. C'est un narcissisme nauséabond.
Laurent,
Je me permets de te répondre car je suis également cité. Mon but lorsque je fais des dégustations à l'aveugle, entre potes ou à la Rvf, est de prendre du plaisir dans le JEU. Pas prendre du plaisir à boire de bons vins, mais m'amuser à chercher la solution, à mettre en éveil mes connaissances et mon instinct, à résoudre un casse-tête, un puzzle. Ce jeu, me sert à me mettre à nu face à l'objet de mon plaisir qui est le vin. Il me sert à respecter cette passion qui est bien difficile à maîtriser, même avec 50 ans d'expérience. Il y a toujours un biais, un piège, une difficulté, qui nous remet à notre place. Celui qui ne l'accepte pas, qui a peur de jouer, de se comparer aux autres mais aussi et surtout de mettre en jeu son égo, celui-ci met de l'enjeu là où il n'y en a pas. Je vieillis petit à petit, et j'espère avoir cette envie de jouer toute ma vie. Alors, être un compétiteur, c'est le moins que l'on puisse être, dès lors qu'on s'engage dans un concours ou un sport, où il y a un affrontement. Si je joue, je veux GAGNER ou tout du moins faire de mon mieux. Si je perd? Et bien j'ai perdu. Et alors? Et bien, je re joue pour regagner et je re perds. Bah merde alors
. Gagner sans plaisir, aucun intérêt. Perdre sans plaisir, aucun intérêt. Mais perdre avec du plaisir, ça commence à devenir sympa. ET gagner avec du plaisir donne une satisfaction d'avoir bien fait les choses. Cette satisfaction n'est pas la manifestation d'un égo disproportionné ou d'un narcissisme exacerbé, mais la saine réussite d'un objectif.
Quand nous partons avec Greg en Champagne pour l'étape Rvf ( Greg pourra confirmer ou infirmer ), quel est notre projet? Il est de passer un we sympa lié au vin, dans un hôtel agréable ( d'ailleurs, nous étions les seuls dans la piscine et le sauna, c'est à se demander parfois si les gens, pour la plupart des participants à l'épreuve savent profiter des plaisirs qui nous sont offerts ), à coût mesuré, avec un restaurant de qualité qui accepte nos bouteilles, de visiter un producteur et de s'amuser pendant le concours. Notre objectif est évidemment de réussir au mieux cette épreuve et si possible, évidemment, d'être bien placé plutôt que mal classé! Parce qu'à titre personnel, les gens qui vous laissent gagner aux cartes par sympathie ou bienveillance, ça me gâche mon plaisir et je trouve cela très peu respectueux du jeu, de soi et de l'adversaire. Tu vois, j'aime Nadal sur un point. C'est un compétiteur, un tueur, d'une rare humilité et d'un grand respect pour l'autre. Il joue pour lui, il reste dans sa bulle, prend du plaisir à la réussite d'un geste efficace, comme nous qui pourrions percevoir d'un sens un pinot noir du Jura qui nous ferait gagner. En dehors du match, Nadal ou Simon vont te parler des heures de leurs sensations, de techniques, des difficultés à être un champion. Il acceptent le debriefing, sans se cacher, sans défendre un égo mal placé ou défendre un enjeu illusoire. Quand un petit entraineur lui fait la réflexion qu'il va devoir changer sa technique de service pour exister, il ne se vexe pas et n'avance pas qu'il a plus d'expérience. Il écoute, analyse, est sincère avec lui et se met au boulot, car son service était digne d'une fillette de 12 ans.
Concernant la notoriété, j'espère qu'il n'y a pas de malentendu entre nous. Je ne la cherche évidemment pas. Car si tel était le cas, je m'y prendrais très très mal. Je n'ai ni l'envie, ni les moyens financiers ou logistiques, ni le temps, de cracher 4000 vin/an. Je ne déguste que très très rarement certaines régions, je ne participe quasiment jamais à des soirées dégustations et je bois en définitive, même pour le plaisir, relativement peu. Donc ni mon projet, ni mon but et encore moins mes objectifs vont dans le sens de la quête de la notoriété. Il faut être sincère avec soi. Je le suis. Seuls le PLAISIR et le JEU comptent.
Et comme l'a souligné Greg, les deux sont compatibles et sont soumis à des objectifs et buts différents. Moi déguster un vin, une Côte Rôtie à table avec des potes, j'adore. Mais j'adore aussi cracher 12 bouses et battre Greg 150 points à 25 points, que veux-tu, j'essaye de rester jeune.
Au plaisir.