Jacques Perritaz, biologiste de profession, a cherché le meilleur moyen de valoriser la production des pommiers haute tige fribourgeois. Il a ainsi installé une petite entreprise de fabrication de cidre. Mais pas n'importe quel cidre!
Le côté gastronome, allié au désir de faire quelque chose de ses mains, poussèrent ce scientifique à aller voir en Normandie. Il y a rencontré Eric Bordelet, un des plus réputés producteurs de cidre de Charchigné, dans la Mayenne . Il est rentré convaincu de pouvoir faire quelque chose de ces pommes fribourgeoises et de donner des lettres de noblesse au cidre qui se buvait autrefois dans les campagnes, mais qui était considéré comme un sous-produit. Il voulait parvenir à fabriquer un cidre de qualité qui pourrait s'assimiler à du champagne.
Le mélange savamment dosé donne un cidre très fruité, demi-sec et pétillant, du nom de «La Transparente»
Jacques Perritaz a entrepris l'aventure en allant trouver les propriétaires d'arbres haute tige et en leur proposant de cueillir les pommes; il a rencontré des gens heureux de se débarrasser de ces fruits, que certaines distilleries voulaient bien accepter pour 10 centimes le kilo livré sur place.
Il procéda ensuite à la transformation, mais a dû limiter le travail de la cueillette dès un certain volume atteint. Il a débuté sa production à son domicile, et petit à petit, il a fait l'acquisition du matériel adéquat comme la broyeuse, un pressoir à bande pour fruits à pépins, la boucheuse à champagne semi-automatique, etc. Depuis une année, sa petite entreprise est installée au Mouret (dans les locaux spacieux d'une ancienne tuilerie) sous le nom de Cidrerie du Vulcain.
Il faut compter 2 kilos de pommes non traitées pour 1 litre de cidre. La meilleure base est la pomme douce, qu'il faut associer à différentes variétés comme la pomme de fer qu'on ne trouve pratiquement plus dans le commerce, mais qui possède des arômes splendides alliés à un tanin exceptionnel. Assemblée à la Transparente, la Jack Lebel, la Rose de Berne et la Reinette, le mélange savamment dosé donne un cidre très fruité, demi-sec et pétillant. Ce délicieux nectar est commercialisé sous le nom de «La Transparente». La production a doublé et va atteindre 12 000 bouteilles pour la production 2008 et pour la première fois, Jacques Perritaz en exporte au Danemark.
Au chapitre des nouveautés, Jacques a déjà à son actif un merveilleux calvados qui a mûri cinq ans dans un fût de chêne pour acquérir la belle couleur dorée propre à cette fine eau-de-vie. Une nouvelle expérience est actuellement en préparation et l'hiver rigoureux de cette année se prête bien à ce nouvel essai. Jacques s'active à la création de «la pomme gelée», une spécialité qui vient du Québec. En laissant geler les pommes à l'extérieur, sous haute sur- veillance, il se crée une alchimie qui donne un jus spécifique pour élaborer du cidre de glace, procédé apparenté à celui d'un vin de raisins flétris.
Par ses origines paysannes, Jacques Perritaz est sensible à la mise en valeur des produits et son credo est «création et promotion des produits du terroir». Il tient à développer son affaire et à créer de nouveaux produits, mais chez lui, on ne trouve aucune velléité d'esprit mercantile: il veut reconnaître la valeur du travail et du savoir-faire du producteur; ainsi, il propose à ce dernier le prix de 40 ct/kilo.
Jacques Perritaz a fondé l'association de la «Midolette», cette petite pomme délicieuse si longtemps appréciée parce qu'elle était la première à mûrir sous le soleil d'août et malheureusement délaissée depuis quelques décennies. Ne possédant lui-même qu'un terrain trop exigu, il va prochainement replanter 60 arbres sur des terrains appartenant à des agriculteurs qui pourront bénéficier des fruits pour leur propre consommation et dont la production majeure sera destinée à la cidrerie.
Son mandat de suivi des prairies et pâturages secs du canton de Fribourg l'a également lié à un projet du Parc naturel régional Gruyère Pays-d'Enhaut. Dans ce cadre, il a pu constater la prolifération des ronces et des épines qui tendent à tout envahir. Pour ce défenseur des valeurs autochtones, nul besoin d'importer des lamas ou autres alpagas; il a trouvé la parade pour y remédier en installant dans ses prés 15 chèvres bottées (race menacée de Saint-Gall) qui font un travail de débroussaillage absolument parfait.
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