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[Jean-Pierre NIEUDAN]

Une médaille d'or au concours des caves particulières en 2005 ; une grande médaille d'or au concours mondial des vins de Bruxelles, deux ans plus tard, pour finir, aujourd'hui, par une cessation d'activité et un nouveau départ, dans le giron coopératif ... A Laure-Minervois, le Prieuré S t -Martin illustre, en un singulier raccourci, la grandeur et les vicissitudes de la viticulture , telles que les vivent tant et tant de vignerons audois.

Pourtant, qu'elle était belle, l'ambition portée par Bruno Legoux, en 2002. Le vigneron coopérateur en Malepère, après un riche parcours dans l'élevage au Canada, puis les céréales en Lauragais, avait trouvé, en Minervois, un domaine à la mesure de son rêve : travailler des volumes réduits pour livrer des cuvées haut de gamme.
C'est ainsi qu'avec un ingénieur agronome-oenologue, il s'installe à Laure, séduit par les paysages et les 23 ha de vignes ondoyant sur la colline de Gibalaux. « J'adhérais totalement au discours des dirigeants viticoles et des banques qui disaient que la sortie de crise était vers le haut, qu'il fallait garder confiance et miser sur la qualité ».

Arrachage et replantation avec les cépages les plus qualitatifs, conduite de la vigne respectueuse de la nature, effeuillage et éclaircissage minutieux pour obtenir des grappes de qualité optimale, vendangées à la main, vinification et assemblage couvés de toutes les attentions... Bruno Legroux et ses associés ne lésinent sur rien pour assouvir leur ambition.
Avec, à la clé, l'une des quatorze grandes médailles d'or obtenues par des vins français lors du concours mondial de Bruxelles 2007, parmi quelque 6 000 échantillons venus des grands vignobles de tous les hémisphères.

Las ! Le modèle économique s'avère d'emblée caduc, avec l'effondrement des cours du vrac en AOC minervois, doublé de cinq années de sécheresse (lire ci-dessous) . Jusqu'à cette funeste vendange 2008, déclassée en vin de table et vendue à 32 € l'hecto ; moins encore que la distillation... Constat amer : « Le vrac n'a jamais pu apporter la trésorerie. Quant aux bouteilles... » Alors, après avoir porté l'exploitation à bout de bras, Bruno Legroux a décidé, en fin d'année dernière, de jeter l'éponge : « C'était l'aventure de ma vie. Mais, avec des charges fixes de 1 500 € à l'hectare, sans prendre de salaire, je perdais de l'argent chaque année. Ce n'était plus tenable ».

A 54 ans, passion toujours intacte en dépit de ce rêve inachevé, Bruno Legoux réorganise son activité, seul et dans un autre cadre : il va poursuivre la conversion des 15 ha qu'il conserve, pour permettre la taille mécanique ; augmenter les rendements, aussi, et porter, désormais, sa vendange au Cellier Lauran-Cabaret, la cave de Laure-Minervois. Au Prieuré Saint -Martin , comme dans tant d'autres domaines, une belle page se tourne...

V.B.
http://www.midilibre.com/articles/2010/ ... 97088.php5