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[Jean-Pierre NIEUDAN]

Femmes productrices, oenologues, sommelières, négociantes, dans un milieu traditionnellement masculin, la gent féminine a joué des coudes pour se faire une place sur la planète vin, ont reconnu les professionnels lors du salon Vinexpo.

"Il y a une révolution silencieuse", s'exclame Marie-Laurence Saladin, jeune viticultrice de l'Ardèche. "Les femmes ont toujours été très importantes en viticulture, mais elles travaillaient dans l'ombre, maintenant elles sont seules maîtres à bord".

Avec une productrice du Beaujolais, elle a organisé à Vinexpo une dégustation réunissant une centaine de "femmes de vins" de toutes les régions de France, une première pour ce salon qui s'est achevé jeudi. Parmi les 48.000 visiteurs de ce grand rendez-vous international des vins et spiritueux, 30% de femmes.

"Depuis deux-trois ans, la profession se féminise, les femmes sont rigoureuses et sensibles, elles sont un atout en contrôle qualité", a déclaré à l'AFP Philippe Dhalluin, directeur général du groupe propriété de Philippine de Rothschild.

Margaux, Latour, Palmer, Yquem... dans plusieurs grands crus classés bordelais, au moins une femme joue un rôle clé.

"Quand elles reprennent les rênes d'une propriété, elles ajoutent une partie intuitive et l'intuition amène des vins plus sensibles", estime Karine Valentin, journaliste à "Cuisine et Vins de France".

En outre, les productrices "sont davantage en adéquation avec la nature", souligne-t-elle, "elles apportent ce respect du terroir et un doigté, une douceur qui font l'équilibre du vin".

"On a une vision plus globale, à long terme", juge Chantal Pegaz-Gajowka, viticultrice qui a créé un GIE de femmes productrices en Beaujolais. "On veut montrer l'exemple, alerter, transmettre la culture du vin aux prochaines générations, il n'y a pas de temps à perdre: la viticulture est en danger" avec le phénomène de "diabolisation" du vin qui conduit à la baisse de la consommation en France.

"Il faut une certaine ténacité pour aller au bout des choses", observe Adeline de Barry, viticultrice à Draguignan, car "sur le plan agricole, c'est plus difficile d'y arriver, on essaie toujours de nous avoir".

"Il a fallu faire ses preuves", renchérit Mlle Saladin, qui a repris avec sa soeur la propriété de la famille, dans le vin depuis 21 générations mais pour la première fois gérée par des femmes.

"Si on n'est pas bedonnant et on n'a pas 50 ans on n'est pas pris au sérieux", rapporte Stéphanie Vial, importatrice en Belgique.

"On n'a pas droit à l'erreur", déclare aussi à l'AFP la Chinoise Jeannie Cho Lee, étoile montante de la critique en vin. "En Asie c'est toujours vraiment macho, dans la hiérarchie, ce sont surtout des hommes".

"En Amérique latine, être une femme dans le business du vin serait presque un atout", précise Andreia Gentilini, directrice export de Wines of Brasil.

Les femmes sont de plus en plus "décomplexées", selon une enquête publiée par Vinexpo. 58% affirment connaître le vin aussi bien que les hommes, et même 67% pour les Américaines.

Contre toute attente, c'est le "rouge" qu'elles préfèrent (51,1% contre 26,4% pour le blanc).

Pour beaucoup de professionnelles, il n'y a pas de vin féminin.

Pourtant, pour séduire cette cible dans les rayons, les exposants de Vinexpo ont rivalisé de nouveautés: Bag in Box roses en forme de sacs à main, vins allégés, étiquettes fleuries. Le groupe espagnol Freixenet a même donné carte blanche à son oenologue femme qui a conçu un blanc et un rouge au goût sucré.

http://www.rtl.be/loisirs/rtellesils/cu ... an-te-vin-