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[Winemega-Alain]

J'inaugure cette rubrique pour y faire parvenir les dernières nouvelles du front pour ce qui concerne la gestation du 2010.

Je commence avec un mail reçu hier après-midi de Christophe Coupez, l'oenologue de la Chambre d'Agriculture de la Gironde, et que je vous livre inextenso.

"2010 sera magique chez beaucoup, exception faite de ceux qui semblent faire exprès de râter un millésime béni.
Les vins commencent à s'exprimer, les vendanges vont se terminer d'ici 2 semaines, les macérations commencent.
Nous avons des tanins magiques, surtout sur les Cabernet sauvignon.
Les Merlot quant à eux sont très aromatiques et gras.
La fraicheur de ce millésime équilibre bien la richesse en alcool et en tanins.
Les couleurs sont noires.
Bref...je me demande encore si je ne rêve pas.
Ce sera meilleur que l'an dernier!"

[Sébastien M]

Ouais super encore le millésime du siècle, ce n'est que le cinquième en 10 ans!!!
Normalement si tout se passe bien 2011 devrait être le millésime du l'histoire.
Merci quand même Alain de retranscrire ce courriel

[Didier]

Lire chaque année la même chose nous empêche de vieillir....

[Frédéric B.]

Le pire c'est que c'est peut-être vrai!
Mais à force de crier au loup, plus personne n'y croit...
Heureusement pour moi, aucune naissance en 2010, donc je n'achèterai pas Les Pagodes de Cos 2010 à 160 euros HT ou Lafite 2010 à 1850 euros HT...

[Jean-Pierre NIEUDAN]

Tu es un sage , Didier

[franck.v]

Fred,

Pour moi, c'est le contraire, mais je me suis promis de pas dépasser 250 HT pour un Pagode et 1500 HT pour mes Haut-Brion.
A bientôt 40 balais, on va pas me la faire, non mais !!!
Franck.

[Gabas]

Il a plu de mi-Septembre à mi-Octobre sur Bordeaux (encore plus en Bourgogne) ce qui n'est pas un signe de grand millésime...à voir...

[Didier]

Il n'y a plus jamais de mauvais millésime à Bordeaux! Avec la chimie, la technique et surtout la COM. tous les millésimes sont grands, voire très grands, voire immenses ; le mouvement perpétuel existe bel et bien en ce bas monde...
Mais peut-être que ce sera effectivement une année intéressante.
J'en saurai sûrement plus au Grand Tasting après avoir parlé avec de vrais vignerons...

[Frédéric B.]

Les mauvais millésimes sont de plus en plus rares, en effet.
Et comme tu le dis, Didier, la com prend le relais là où la technique et la chimie s'arrêtent.
Ainsi, combien de châteaux ont essayé de nous faire croire que 2007 était un bon millésime à Bordeaux, entre autres en chargeant les prix comme des mules? (Car c'est connu, si c'est cher, c'est que c'est réussi)
Et combien de cavistes ou de vendeurs de GD essaient maintenant de faire croire à l'acheteur final que 2007 est un très beau millésime?
ça s'appelle une patate chaude, et tout comme la TVA, c'est le consommateur final qui la mange... et qui se brûle!
Nous en parlions avec Laurent récemment: quelle grande preuve d'honnêteté aurait été, de la part des vignerons, de consentir à une baisse substantielle du prix des 2007! Je ne parle pas des domaines qui luttent pour payer leurs traites, mais du top 50 bordelais, ceux-là mêmes qui ont fait exploser leurs prix à partir de 2005...
Comme par hasard, ils ont tous réussi à tirer le meilleur du millésime. Quelle chance! Un vin à boire rapidement, même pas la peine de l'attendre 20 ans, que demande le peuple?
A dans six mois pour que la grande rigolade annuelle commence...
A suivre, le phénomène d'hypnotisme habituel:
1) 2010 est tellement cher que je vais m'acheter des 2009, ils sont plus abordables.
2) Les autres 2010 sont tellement chers que le château X, qui n'a augmenté que de 40%, est meilleur marché. Je vais acheter celui-là.
Et vogue la galère!

[Gabas]

Fred,

Que penses-tu de la météo sur Bordeaux de mi-Septembre à mi-Octobre, toi qui es sur place ?

[Frédéric B.]

Julien,
Je t'avoue que je n'y suis pas très attentif... mais il est certain que le mois d'octobre a été assez voire très pluvieux.
En tout cas, à Bordeaux même!
Mais je serais bien incapable de dire quelles conséquences ont eu ces pluies sur le vignoble...

[Jean-Pierre NIEUDAN]

Thierry Breda ( Château Garrigues ) m' a téléphoné cet après-midi :

il venait de finir les vendanges ( oui oui ) , il attend de voir ce que donneront les cuves , pense qu'il y aura de belles choses dans le bordelais mais craint ( à confirmer ou infirmer ) que le vin ait un potentiel de garde moindre ...

jpierre

[Gabas]

Ceux qui ont vendangé la semaine dernière ont-ils eu des gelées sur Bordeaux ? Car Il y en a eu trois dans les landes...
Question : c'est grave pour le raisin les gelées ??? Quand je vois les dégâts que ça a fait sur mes tomates et les figues (éclatement des fruits), ça fait peur...

[Winemega-Alain]

Christophe Coupez nous en dit un peu plus..

Pauillac le 28.10.2010

Alors qu’Adrien Tramier entame ses vendanges avec une belle récolte sur souche, dans un état sanitaire parfait, les fermentations alcooliques et les macérations vont bon train dans les autres propriétés.
2010 révèle peu à peu son beau potentiel, malgré une hétérogénéité déjà palpable. Les vins sont souvent noirs. Ils sont aromatiques. Ils ont de belles structures tanniques et du gras. Ils gardent une belle fraicheur. Tout cela grâce à un compromis entre une maturité optimale, une concentration naturelle des raisins, un équilibre analytique parfait.
Les Merlot pourront selon les cas soit apporter la touche de douceur aux Cabernet, soit constituer l’ossature des vins. En effet, selon les chais, ils peuvent être plus ou moins puissants.

Dans tous les cas néanmoins, ils prennent beaucoup de gras en macération et expriment des notes aromatiques surprenantes d’olive noire, de cacao, de belle maturité en somme.
Les Cabernet quant à eux sont soit élégants et fins, aux tanins doux et discrets, apportant de la fraicheur par leur équilibre alcool/acidité, soit puissants et structurés. Dans ces cas, ils donnent des tanins délicieux, déjà trouvés, rarement, en 2007, et couramment en 2009. Ces tanins sont granuleux, crayeux, comme ceux du cacao (j’ai trouvé à Bordeaux une source de chocolat 100% cacao, quel bonheur ! Eh ! bien, ce sont les mêmes tanins dont je parle). Ils vous roulent sur la langue. C’est une sensation unique, délicieuse. En jus, ils ont des arômes qu’un grand directeur technique compare à la panouille de maïs. Pour ma part, ils me rappellent le riz au lait avec une gousse de vanille. Nous sommes loin, très loin, des notes de légumes inhérentes au manque de maturité. Mais il est encore difficile de vous décrire ces grands Cabernet. Ils n’ont pas encore macéré. Je les sens très prometteurs. Ils feront la structure, la charpente de nos vins. Mais il faut les laisser se nourrir de la macération pour qu’ils s’expriment.

J’entame aujourd’hui ma huitième tournée (entre 15 et 20 propriétés par jour). Il m’en restera deux la semaine prochaine.
J’ai vu comme je l’ai dit plus haut de l’hétérogénéité. Autant certains chais, certaines communes, sont homogènes, délicieux, enthousiasmants, il arrive néanmoins de trouver, ô déception, des cuves végétales. Je ne l’aurais pas pensé. Certes, pas d’IBMP cette année. Mais le fruit n’est pas toujours au rendez vous.
Les terroirs qui souffrent moins de la sécheresse s’en sont bien sortis. Tant sur le plan maturité que sanitaire. Certaines propriétés ont osé un pari culotté de démarrer tard leurs vendanges. Mais ils ont conjugué leur maîtrise du vignoble à la climatologie clémente. Ils ont aussi calculé les risques et pris juste ceux qu’il fallait. Je tire mon chapeau à Emmanuel Bonneau, directeur technique du Château Rollan de By à Bégadan. Il a démarré ses vendanges le 11 octobre, doucement, puis a eu la capacité d’accélérer pour finir cette semaine. Le chai, aussi grand soit il, est un délice.

Château Saint Saturnin, à Bégadan également, a entamé ses vendanges le 21 octobre. Les cuves en macération préfermentaire sont une gourmandise.
Parmi les autres réussites, les vins de l’Ile Margaux, dont les cuves sont toutes aussi belles les unes que les autres. Un petit mot enfin sur les Petit Verdot, que j’affectionne particulièrement. Ils nous ont exprimé des notes encore inconnues de fruits blancs, de fruits exotiques, de fruits rouges…bref, un cocktail inédit et aromatique que nous vous promettons de valoriser dans des assemblages futurs.

Mais j’anticipe beaucoup. Il nous reste du chemin à parcourir d’ici là. J

Christophe COUPEZ

[Didier]

Des nouvelles du domaine TROSSET et du domaine GRAILLOT (tous deux par Louis TROSSET).
2010 se présente très bien, comme un bon à très bon millésime et avec une acidité un peu plus marquée que 2009, garante d'un épanouissement harmonieux sur plusieurs années.
Le millésime sera "classique" mais qualitatif.
Bref, de bonnes nouvelles!!!

[vinosophe]

...et pendant ce temps là, on continue à vendanger à SAUTERNES ! et oui!...on approche de la 10ème trie dans certains domaines !

encre de beaux nectars en perspective!

[Didier]

Christophe,

Si je te comprends bien, à Sauternes, nous allons avoir un millésime "difficile", n'est-ce pas?

[julien dubertret]

Au fait, Emmanuel Reynaud n'a pas encore fini ses vendanges
J'étais à Châteauneuf le 9 octobre et la majorité des bons vignerons avaient tous terminé !
Julien

[Winemega-Alain]

Quid du Millésime 2010 dans le monde?

France
En général, 2010 est plutôt prometteur malgré, une année plutôt fraîche dans de nombreuses régions.
Bordeaux semble être le grand gagnant grâce à de longues périodes ensoleillées associées à des nuits fraîches, permettant la maturation optimale des raisins. Les degrés alcooliques sont cependant très élevés (>14° par endroits) et la vinification n'a pas été aisée.
La Bourgogne est assez hétérogène, notamment sur les rouges dont certains ont été vendangés trop tôt à cause d'une météo incertaine.
Excellents vins en perspective dans le Beaujolais, qui s'annoncent fruités et équilibrés.
En Languedoc-Roussillon, on aura une belle année. Les vendangeurs y ont cueilli de belles baies, à la fois petites et concentrées, qui poussent les producteurs à l'optimisme.
L'Alsace et la Loire annoncent un millésime 2010 aux rendements moyens, mais cependant très qualitatif.
En Champagne, la pluie a joué les trouble fête avec d'importantes attaques de pourriture grise, nécessitant un énorme travail de tri. Peu de Champagne millésimé en perspective en 2010!
Le Rhône enfin, a vu en 2010 une toute petite récolte en quantité, mais très belle en qualité. La forte teneur en anthocyanes extractibles a donné des couleurs profondes et denses aux 2010. Au nez, les vins sont aromatiques, francs et complexes, grâce aux températures fraîches en août et en septembre. Les équilibres sont parfaits et le potentiel pour de grands vins de garde, en Rhône méridional comme septentrional, est particulièrement prometteur. Grande année pour les vins blancs qui sont purs et d’une grande finesse.


Espagne
Impossible de généraliser le millésime 2010 en Espagne!
Alors que Rioja et la Ribera del Duero parlent déjà d'un grand millésime comparable à 2004, la Manche et la Catalogne ont souffert d'attaques véhémentes d'oïdium et de pourriture en début et en fin de cycle.
La qualité est donc très variable, non seulement d'une région à l'autre, mais au sein même d'une même province. Certaines régions ont souffert d'une grosse canicule en juillet-août et les vins manquent parfois d'acidité.
Les volumes sont cependant supérieurs à 2009.

Suisse
La conduite du millésime 2010 en Suisse romande (Valais, Vaud, Genève, Neuchâtel) fut souvent laborieuse, marqué par des visites régulières de "l'ami" oïdium, nécessitant une vigilance sans relâche. Mais l'arrière saison a, une fois encore, bien arrangé les bidons! Les degrés sont très satisfaisants et l'acidité atteint un excellent niveau, présageant des vins possédant matière et équilibre. Les rendements sont cependant en baisse marquée (jusqu'à -30%) par rapport à 2009.
La qualité au Tessin est considérée comme "satisfaisante à bonne".
En Suisse Allemande et aux Grisons, les ravages dus à l'oïdium et à l’été, humide et frais, laissent présager d'un millésime plutôt moyen.

Allemagne
Beaucoup considèrent que la qualité du 2010 est véritablement inespérée au vu d'une saison météo compliquée dans la plupart des régions viticoles allemandes.
L'hiver particulièrement rude et long, a entraîné un débourrement lent et tardif de la vigne. La coulure préleva ensuite son dû pendant la floraison printanière. Durant le mois de juillet, caniculaire, la grêle a totalement détruit plus de 1500 hectares dans le Palatinat méridional. Août fut frais et pluvieux avant qu'un mois de septembre exceptionnellement favorable sauve finalement le millésime.
Les vignerons, tirant les leçons de 2000 et 2006, ont beaucoup effeuillé et trié sur pied. Ainsi, les degrés alcooliques sont finalement élevés et une majorité de vins présentent une intéressante diversité aromatique et un bel équilibre en bouche. Les volumes produits sont les plus faibles depuis 1985. Les plus grandes réussites en 2010 se trouvent probablement en Franconie, Moselle et Rheingau.


Italie
2010 en Italie sera d'un classicisme comparable aux 1982 ou 1996. La saison a été caractérisée par une alternance de périodes pluvieuses et ensoleillées, qui ont nécessité un gros suivi au vignoble.
Les vins de Barolo et Barbaresco sont équilibrés et d'un grand potentiel de garde. En Italie centrale, la Toscane a produit des vins de belle facture, au profil empreint de fraîcheur et d'élégance. Dans le sud, la production est plus homogène qu'au nord et sera, cette année, particulièrement marqués par la finesse de leur texture.


Autriche
En fonction des régions, l'éventail des vins va d'un style élancé, fruité et acidulé, à des crus opulents et superbement équilibrés, avec des degrés d'alcool modérés.
Dans le Burgenland, le millésime semble certes propice aux vins doux. mais globalement, les vins autrichiens ont souffert d'une météo trop capricieuse. Les volumes sont ridiculement bas et la qualité très variable. 2010 nécessite un gros travail de sélection de la part des amateurs.


Australie
Faibles rendements en 2010 également dans l'hémisphère sud avec des baisses en volume entre 8% et 20% selon les régions. Ceci devrait quelque peu contribuer à assainir une situation économique critique dans la filière et relancer les prix, après la baisse vertigineuse causée, ces dernières années, par une production pléthorique et une chute de 20% des exportations à cause de la crise. La qualité des 2010 est généralement considérée comme bonne à très bonne, pour les blancs comme pour les rouges.


USA
Une année compliquée aux Etats Unis. Un été anormalement frais et pluvieux en Californie a créé quelques soucis inhabituels chez certains producteurs. Les bons viticulteurs tirent certes leur épingle du jeu, mais globalement, la qualité en 2010 est franchement considérée comme très moyenne.. Voire pire !


Amérique Latine
Les petits rendements à cause d'un gel meurtrier, font de 2010 un millésime élégant, assez peu chargé en alcool, que les spécialistes locaux comparent déjà à l'excellent 2002.
Au Chili, 2010 a été perturbé par l'énorme et meurtrier tremblement de terre de février 2010. Certains producteurs ont perdu des cuves entières. En cumulant avec l'effet de rendements déjà réduits par une floraison perturbée, les volumes sont en baisse de près d'un quart par rapport à 2009. Les vins sont certes de structure moins complexe que lors des grandes années de la décennie écoulée, mais ils se présentent bien équilibrés, avec un bonne structure garantissant un potentiel de garde satisfaisant.


Afrique du Sud
Visiblement, la Coupe du Monde de foot 2010 n'a pas trop porté chance aux viticulteurs locaux. Des conditions climatiques erratiques ont rendu le travail à la vigne compliqué et difficile. Le vent et la pluie ont perturbé la floraison et ici également, les rendements sont en sévère baisse par rapport à 2009, surtout sur les cépages blancs tels que le Chardonnay. Météorologiquement, l'été fut heureusement plus calme et la qualité des rouges est finalement considérée comme plutôt bonne, avec des vins bien structurés et profonds aux tannins abondants, mais fins.

(Sources d'inspiration: Vinum, Wine Spectator et divers rapports spécialisées sur Internet)

[Didier]

Merci Alain.
Très interessant.