Après l'analyse de Jeff Leeve voici celle de Jean-Marc Quarin sur ce millésime 2020 en bouteille qui me semble plus nuancée mais qui place tout de même ce millésime un cran au dessus de 2019. Je précise que cette analyse est partagée via la newsletter donc pas de problème de copyright
Bonne lecture.
Les Bordeaux 2020 en bouteilles : 463 vins retenus
Conclusion, analyses, comparaison avec 2019, synthèse et tableaux
Carnet 105 (mars 2023)
Meilleures appellations selon les vins concernés
Numéro 1 : Pomerol
Numéro 2 : Pauillac
Numéro 3 : Pessac Léognan rouge et Saint-Emilion
Les résultats par régions
Rive droiteParmi les vins notés entre 16 et 20, la rive droite l'emporte (53,7 %).
Cette différence est principalement due aux vins notés entre 16 et 17. Pour les tranches au-dessus les résultats s'équilibrent.
Fronsac : grand millésime homogène. Pour les vins concernés, c'est l'appellation qui élève le plus sa qualité depuis 2019.
Pomerol : grand millésime qui concentre les deux plus grandes réussites. 20/20 pour Lafleur et Le Pin. Une première pour ce cru.
L'appellation hausse son niveau de qualité vis-à -vis de 2019.
Saint-Emilion : grand millésime en hausse vis-à -vis de 2019.
Satellites de Saint-Emilion et Côtes : grand millésime hétérogène. Les facteurs humains y sont plus déterminants.
Rive gauchePauillac l'emporte devant Pessac-LĂ©ognan et Saint-Julien.
Pauillac : meilleure appellation de la rive gauche dans ce millésime. Résultat hétérogène, variant de très bon à grand. Cependant c'est aussi la seule grande appellation du Médoc où mes notes moyennes de 2020 après la mise sont inférieures à celles de 2019.
Pessac Léognan : grand millésime homogène. De nombreux crus montent en gamme : Larrivet Haut Brion, Latour Martillac, Olivier, Bouscaut et même les seconds vins de Smith Haut Lafitte.
Saint-Julien : grand millésime très homogène. C'est l'appellation de la rive gauche qui élève le plus son niveau moyen de qualité comparé à 2019. Je n'ai pas vu un Léoville Las Cases aussi impressionnant depuis 1986.
Margaux : millésime très bon à grand. Résultats hétérogènes du même niveau que le 2019. Brane Cantenac époustoufle pour la seconde année consécutive.
Saint-Estèphe : millésime très bon à grand. Résultats hétérogènes comparables à ceux de 2019. Pour la première fois, Cos d'Estournel domine ses pairs. Il redouble ce succès en prenant la tête des vins blancs secs du Médoc.
Vins blancs secsBon à très bon millésime, hétérogène avec de gros succès. Résultats inattendus eu égard les pics de chaleur de l'été. Les vins se présentent moyennement aromatiques et restent frais, sans acidité en bouche, sans manquer de dynamique. L'attaque peut être parfois un brin compotée. Les finales ne le sont pas du tout. Grande réussite du Domaine de Chevalier, des vins blancs de Haut Brion, de Smith Haut Lafitte, de Cos d'Estournel blanc.
Vins blancs liquoreuxTrès bon millésime. Son hétérogénéité repose sur des différences stylistiques entre les crus vendangés avant l'arrivée de la pourriture noble et ceux, moins nombreux, qui ont su l'attendre. Vins délicats, fondants, purs et savoureux, parfois profonds. A Barsac, Doisy Dubroca et son jeune vignoble commence à nous offrir un profil aromatique à dominante florale bien distinct de celui de Doisy Daëne.
Deux spécificités gustatives du millésime 2020 à garder en mémoireLa première concerne le milieu de bouche. Pour nombre de crus, ce fut une bataille pour l'obtenir. Une des raisons probables tient à la pluviométrie plus élevée que la moyenne de mars à fin juin, limitant la contrainte hydrique et l'impression de corpulence tramée. Au mieux, vous remarquerez une fluidification heureuse des sensations tanniques. Au pire, vous trouverez des vins manquant de corps et de personnalité, mais rarement âpres.
La seconde relève d'un choix cornélien à faire en septembre, en fin de maturité, pour les producteurs. A savoir : ne pas tarder à vendanger pour garder de l'arôme, du goût ou attendre, au risque de les perdre, pour mieux mûrir le tannin.
Dans la dégustation des vins aujourd'hui, ceux qui ont choisi de préserver les arômes peuvent présenter une finale tannique légèrement plus ferme. C'est plutôt légitime à Bordeaux à ce stade. Ces finales se fondront. A l'inverse, ceux qui ont essayé d'embellir le corps à travers la vendange d'un tannin plus mûr, manquent aujourd'hui d'éclat, de goût et de relief. Ils sont taniquement agréables, mais un peu fades.
Fait rare, ce choix cornélien concernait à la fois les terroirs précoces qui furent embarrassés par une première quinzaine de septembre très chaude, mais aussi ceux plus tardifs qui furent à leur tour gênés par une seconde quinzaine pluvieuse.
Et puis, il existe cet autre constat auquel la vigne et le raisin demeurent soumis : en 2020 les fruits de l'été sur nos tables ne brillaient pas par leur saveur !