Repas dégustation :A la table du Relais & Château Cordeillan-Bages à Pauillac (Gironde), j’ai eu l’immense joie Jeudi 14 Avril, de participer à un dîner gastronomique mariant la fine cuisine du chef en place Jean-Luc Rocha, aux champagnes de la maison Dom Pérignon.
Chaque deuxième Jeudi du mois, le restaurant propose à sa clientèle une escapade gastronomique alliant mets et vins de grande distinction. C’est sous le signe de la convivialité, du partage et des accords mets & vins que la soirée se déroule et pour l’occasion, Jean-Luc Rocha, chef doublement étoilé du magnifique relais & Château, concocte un menu original à 14 convives venus (re)découvrir les grands champagnes de la maison Dom Pérignon.
Alors que la nuit glisse doucement sur les vignes de Pauillac, Lucie et Nicolas Geoffroy invitent chaque convive à pénétrer dans l’ambiance feutrée et chaleureuse d’un salon particulier où Stanislas Rocoffort de Vinnière, ambassadeur Dom Pérignon, présente le premier vin de la soirée.
Quelques informations :Dom Pérignon est un vin d’exception produit sur quelque 500 hectares de Grands Crus champenois. Cette importante surface viticole intégralement classée en Grand Cru, permet de donner naissance à un vin reflétant une mosaïque de terroirs. L’ambition qualitative et stylistique de Dom Pérignon est axée vers l’harmonie, la délicatesse et la souplesse, tant en terme de bulle, que d’équilibre, d’aromatique ou de toucher. Pas question de faire un vin trop typé ni original, au contraire, du classicisme avant tout chez Dom Pérignon. Parmi les 500 hectares de vigne, certains terroirs conférant vivacité, d’autres rondeur, ou encore puissance, minéralité, ou finesse, c’est par le mariage de ces expressions diverses du terroir, que Dom Pérignon souhaite représenter la Champagne. Parce que le terroir ne s’exprime dans un vin qu’à travers le raisin qu’il porte ; c’est à travers deux cépages nobles et complémentaires de Champagne que Dom Pérignon choisit de faire parler ses terroirs et de donner naissance à un vin tout en harmonie. Les deux cépages sont d’une part le Chardonnay, cépage blanc offrant selon son origine un vin à l’équilibre dynamique, vif et tendu, parfois salin aux arômes de citron, noisette, beurre ou brioche et d’autre part le Pinot Noir, cépage noir donnant des vins plus charnus, structurés aux arômes de fruits rouges tels que la cerise et la groseille. Dom Pérignon est donc un vin qui lie le blanc au noir, l’obscurité à la lumière, dans l’optique de trouver le parfait équilibre, la parfaite harmonie et de reproduire chaque année avec le même souci de perfection cette signature de style. Vous l’avez donc compris, pas d’originalité ni bizarrerie chez Dom Pérignon, revendicateur d’un style classique fait pour plaire à la majorité. Exit les grandes acidités, (la fermentation malolactique est entièrement réalisée) exit également les arômes oxydatifs recherchés des amateurs de Krug ou de Selosse. Chez Dom Pérignon, la recherche de perfection se fait à travers un style de champagne classique.
Mais Dom Pérignon n’est pas le seul ce soir à rechercher la perfection. L’équipe du restaurant Cordeillan-Bages réserve bien des surprises aux palais des amateurs réunis et engage la dégustation par un « semi-pris de concombre et bar mariné aux aromates », accompagné d’un premier vin :
- Dom Pérignon Vintage 2002.La cuvée « Vintage » de Dom Pérignon est élevée en bouteille et vieillie sous capsule plastique durant 7 ans dans les caves du domaine. C’est suite à cet important élevage en bouteille que le maître de cave décide de commercialiser le vin ; un vin prêt à être dégusté.
La robe est d’une couleur paille brillante, habillée d’une bulle très fine. Le nez est élégant et d’une bonne intensité aromatique, délivrant des parfums de citron, de cardamome, d’amande et de noisette. En bouche, l’attaque est nette, franche, elle donne suite à un équilibre mesuré à tendance dynamique. Le vin est très élégant, à la fois gourmand et frais et armé d’une bulle très fine apportant une touche de légèreté. La finale saline et minérale signe une belle réussite qui déjà reflète le style annoncé par la maison Dom Pérignon.
En seconde assiette est servie une « transparence d’huître Gillardeau, nuage iodé et caviar de Gironde », accompagnée d’une seconde cuvée :
- Dom Pérignon, « Oenothèque » 1996.La cuvée Oenothèque de Dom Pérignon est issue du même vin que le Vintage correspondant mais connaît un élevage plus long (environ 15 ans) sous bouchon de liège et non sous capsule. Le long élevage va distinguer le vin qui va longuement rester au contact des lies, et acquérir un caractère blond, puis brun avec le temps.
La robe est couleur paille à peine plus soutenue que celle du 2002. Le nez est d’une forte intensité aromatique, offrant des fragrances empyreumatiques de noisette grillée, de brioche, de café et de tabac blond ainsi que des notes tertiaires de sous-bois et champignon auxquelles s’ajoutent enfin quelques parfums de fruits jaunes à noyau. L’expression est très aérienne, gourmande et étonnamment pâtissière. En bouche, l’attaque est belle, s’ouvrant sur un milieu de bouche salin, tendu, au toucher moelleux et au parfait équilibre. Le vin est concentré, vibrant, tout en conservant toute la fraîcheur et délicatesse de Dom Pérignon. Le caractère crémeux du vin s’intensifie avec sa montée en température et distingue le vin. Les parfums introducteurs sont ici retrouvés, le vin est pâtissier, ses saveurs sont mariées à une bulle caressante d’une extrême finesse et de belle persistance. Long et aérien, il est incontestablement un vin de grande classe et de haute distinction qui a évolué depuis deux ans, fois dernières où j’avais eu l’occasion de rencontrer ce même vin et où ce dernier présentait principalement une aromatique empyreumatique.
L’élevage sur levure apporte selon Stanislas Rocoffort de Vinnière le gras et la gourmandise que l’on note dans la cuvée Oenothèque. C’est pour illustrer son propos et laisser à chacun l’occasion de se forger un point de vue personnel qu’il nous offre à déguster dans ce même millésime 1996 la cuvée « Vintage »…
- Dom Pérignon « Vintage » 1996.La robe est en tout point comparable à celle de l’oenothèque. Au nez, le vin est réservé et avance une certaine austérité de prima bord. Mystérieux dans un premier temps, l’aération dans le verre lui permet de mieux délivrer ses arômes et de s’offrir plus généreusement. Moins spontané donc que l’Oenothèque, le vin tarde à s’épanouir mais parvient à combler le dégustateur patient. En une demi-heure environ, le champagne offre des senteurs de fruits secs, de croûte de pain, de ferments, de raisins secs et de poivre blanc. Une pointe oxydative présente un vin apaisé par la garde et fardé par temps ; un vin prêt à boire mais sans faiblesse apparente, avec un certain potentiel de garde encore. En bouche, l’idée du potentiel se confirme, car le vin jouit d’un équilibre vif et d’une tension notable comparable à celle de l’oenothèque. Le toucher est quant à lui différent, moins soyeux, plus stricte faisant certainement ressortir l’acidité. La finale est belle, longue et saline comme pour les deux vins précédents.
Une comparaison formidablement instructive puisque les deux vins sont à la fois semblables et différents. Semblables en terme d’équilibre et de minéralité ; différents en terme de palette aromatique et de structure. Un exercice qui, outre le plaisir qu’il apporte au dégustateur, permet à l’amateur de mieux comprendre ces vins.
C’est avec la quatrième assiette : « Crépinette dans la tradition du Bassin et cochon des Aldudes » que nous dégustons le dernier-né des caves de Dom Pérignon :
L’Oenothèque rosée 1990.
Alors que classiquement, les vins de Dom Pérignon sont constitués autour d’un assemblage à peu près équivalent entre Chardonnay et de Pinot noir, cette cuvée rosée trouve sa couleur suite à l’incorporation de 15% de vin rouge de Pinot Noir au sein d’un assemblage initialement plus riche en Chardonnay, toujours dans cette quête d’harmonie. De plus, l’Oenothèque rosée se distingue de la cuvée Oenothèque blanc par sa longue maturation dans les caves du domaine. En effet, le millésime 1990 est le premier millésime commercialisé, tout juste proposé. Il n’en existe pas de nouveau encore… L’ajout de vin rouge en fait un vin requérant une garde plus poussée selon le maître de chais Richards Geoffroy.
- Dom Pérignon Rosé « Oenothèque » 1990.La robe est saumonée, d’un rosé tirant vers la tuile pouvant rappeler de corail ; elle est brillante et habillée d’une bulle très fine. Le nez est d’une complexité folle et d’une grande classe, exhalant dans un premier temps des flaveurs mêlant épices, noisette, brioche dorée, réglisse, orange sanguine puis dans un deuxième temps des parfums précis de baies rouges, framboise et groseille ainsi que cerise griotte prenant progressivement le dessus pour apparaître au premier plan enfin au cours de l’aération. En bouche, le vin adopte une définition de vin rouge de grande élégance et finesse avec une belle profondeur. La structure est cristalline, tendue, presque tannique et l’équilibre impeccable ; le style est aérien, élégant, harmonieux. Un bébé de 20 ans, un grand vin déjà , immense en devenir.
La suite du repas est avancée de telle sorte que le dégustateur puisse apprécier l’évolution des vins en fonction des plats qui lui sont servis. La quatrième assiette est un « bonbon de sole, crème d’asperge et mousse de lait ». La définition marine de ce plat fait se dégager des notes iodées de l’Oenothèque Rosé, seul vin préalablement servi sur une viande.
La cinquième assiette est un « Pigeonneau légèrement fumé, mousserons et rhubarbe, réduction de betterave rouge ». Il est un plat qui pousse les vins dans leurs derniers retranchements. La force du pigeonneau idéalement cuisiné va offrir aux deux cuvées « Vintage » une tension plus soutenue, créant un accord entre un plat puissant et corsé d’un important volume gustatif et des vins droits, longilignes soutenant par leur vivacité la rondeur du plat. Les deux oenothèques évoluent elles aussi et proposent quant à elles un accord très différent où rondeur du plat et rondeur des vin s’additionnent pour avoir un accord riche sans lassitude mettant plus en avant un caractère giboyeux élégamment édifié.
Enfin, l’escapade gourmande se termine par un « Comté millésimé de M. Anthony » puis en dessert, par « Le caramel, mousseux, crémeux, glacé… »
C’est sur ces quelques notes sucrées que la soirée se termine. Chaque plat proposé mériterait des lignes d’écriture tant la réussite est manifeste. Jean-Luc Rocha sait créer des plats à l’allure ciselée et au goût précis. Non seulement l’assiette est merveilleusement belle mais en plus le goût succulent ne fait qu’amplifier le ravissement.
Le service sans retenu (à volonté) des différents vins permet à chacun de noter leurs évolutions à travers les plats, à travers l’aération et la montée en température ainsi que de les comparer les uns les autres. M’attendant à plus de modération dans le service des vins, je fus fort agréablement surpris par cette générosité.
Bravo donc à Jean-Luc Rocha et son équipe en cuisine pour la performance culinaire.
Bravo au sommelier Nicolas Geoffroy pour le service précis de chaque vin.
Bravo à Stanislas Rocoffort de Vinnière pour son excellente présentation ainsi que pour son respect du point de vue d’autrui.
Bravo à l’équipe de salle pour sa belle efficacité et sa grande discrétion permettant au moment vécu de ne souffrir d’aucune pesanteur.
Rendez-vous peut-être Jeudi 12 mai 2011 pour la dégustation « château Latour » avec de beaux millésimes en perspective…
Avis aux amateurs !!
Bien Cordialement
Julien A