Revenons à nos solsComme la grande majorité de la Bourgogne viticole, nos vignes sont situées sur des sous-sols de calcaires jurassique (Bathonien à Oxfordien, -160 Ma). Cependant, le terroir de Quintaine, historiquement reconnu au sein des villages de Viré et Clessé, présente un caractère atypique. (Je me souviens d’un ancien du village qui, lors d’une porte ouverte, courbé sur sa canne regarde l’étiquette et me dit, « Quintaine… c’est tout du Quintaine ? » et devant mon approbation « c’est bon ça Quintaine » avec des étoiles dans les yeux.
Le relief autour de Quintaine engendre une forte densité d’orages estivaux (on les voit arriver par « le trou de la marguerite », un semblant de vallé entre deux monts au sur ouest du hameau), accélérant la décarbonatation des calcaires en limons. Les conséquences sur la physiologie de la vigne et donc sur le style des vins sont de trois ordres :
-l’apport d’eau durant l’été participe à une meilleure acidité naturelle des vins : on parle souvent de blocage de maturité au niveau du sucre mais on oublie souvent que la synthèse acide s’arrête plus tôt que la synthèse de sucre, d’où cette idée générale de vins lourds et pâteux les années chaudes. Aussi loin que je remonte dans nos analyses, nos vins présentent toujours un pH naturel entre 3,10 et 3,20 (malo toujours faites).
-le faible taux de calcaire actif favorise l’implantation de la vigne et modifie la structure des vins. Le calcaire actif est en parti responsable de la trame (attention je vais dire un gros mot) « minérale » des blancs de Bourgogne. De Chablis à Pouilly en passant par Meursault, on retrouve une trame commune : des vins plutôt tendus voir en légère sous-maturité, auquel l’élevage sous bois apporte de la chair (ou pas de bois pour beaucoup à Chablis et je n’ai pas besoin de vous illustrer le côté tranchant, parfois superbe, qu’on peut alors retrouver). (Et si vous voulez faire un « Grand Cru », vous rajoutez une bonne dose de soufre pour que ça soit « fermé mais grand dans 10ans », coucou les copains Beaunois
) Chez nous, les raisins développent leurs arômes à des maturité un peu plus tardives et sont déjà riche/gourmand, le bois risque alors de les alourdir et nous préférons la cuve (béton pour nous).
-les limons accueillent un microbiote légèrement différent qui participe à la fermentation et donc à l’arôme de nos vins (vinifiés en levure indigène).
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Le coteau de Quintaine est exposé au soleil levant, très légèrement vers le sud, il regarde le mont blanc. Sur le coteau les vignes « culminent » (pour un Grenoblois je vous jure qu’écrire ça c’est douloureux) à 300m, on trouve un léger replat à mi hauteur ou sont placés, en plus de vignes (Raverettes), la route principale et les maisons, puis à nouveau des vignes jusqu’à 200m environ. En dessous des champs et des pâturages. La région a toujours été dominée par la polyculture élevage, d’où l’omniprésence des caves coopératives mais également un paysage un peu moins « aride » que d’autres régions 100 % vignes.
Les vignes bénéficient de l’influence climatique de la Saône qui tempère les excès, aussi bien hivernaux qu’estivaux. Et qui les années humide favorise l’apparition de pourriture noble (une spécificité de l’appellation).
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Comme dit plus haut, grâce au travail de remembrement effectué par mes beaux-parents, nous avons la chance de travailler sur 7 parcelles pour 6,5ha, donc des parcelles suffisamment grandes pour nous permettre de créer des barrières naturelles (haies, chemins, etc.) limitant les effets de bordure. Quelques mots sur ces parcelles
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Champ-Rond 2,7haLa plus grande parcelle du domaine, elle descend doucement le long du coteau depuis la forêt jusqu’à la grande haie plantée par Pierrette et Marc. Une large veine de calcaire affleure en traversant la parcelle en diagonale du Nord au Sud. C’est un Calcaire jaune, extrêmement dur et compact (la barre à mine ne suffit pas toujours). Les quelques failles présentes sont étonnamment rempli de petits cristaux translucides de type quartz ou calcite. Les coups de barre à mine font généralement sauter le calcaire le long de ces failles. Cette parcelle forme le cœur de nos vins, on la considère comme la parcelle « médecin » : le vin est toujours bon, plus constant entre les millésimes que sur les autres parcelles.
Sur le bas du coteau, une petite poche plus argileuse est présente. C’est de cette poche qu’est issue notre cuvée « Retour à la Terre » (raisin poussant dans l’argile et élevés dans une jarre d’argile, terre cuite). Cette zone, un peu plus tardive est toujours vendangé le dernier jour des vendanges, c’est aussi ici nous conduisons depuis 2017 nos essais de plantation en franc de pied.
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Champ-Choley 0,8haProche de Champ-Rond mais un peu plus haut sur le coteau, en direction de Clessé (Sud), cette parcelle partage la plupart des caractéristiques de Champ-Rond. On trouve à son sommet une carrière abandonnée qui permet d’observer son sous-sol calcaire presque affleurant. La famille Michel à longtemps partagé son temps entre la vigne et le métier de carrier. Les pierres de Quintaine, étaient extraites jusqu’à la fin du XIXème et réputées de Dijon à Lyon pour la fabrication de cheminées notamment.
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Le Chêne 1,5haPlus bas sur le coteau, un peu en dessous du village, cette parcelle caillouteuse donne des vins très aromatiques. Mais en raison de la pauvreté du sol, les maturités s’envolent rapidement et nous devons donc surveiller les raisins de très près afin de vendanger le bon jour, en évitant les arômes confit et en conservant de la fraîcheur. Ici le calcaire est également très dur, très proche de la surface, mais plus fractionné, formant des cailloux de la taille du poing polis par l’infiltration de l’eau. Certains pieds s’enfoncent donc très profondément dans le sol entre les cailloux.
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Raverettes 1haLa parcelle la plus proche du domaine, au bout du verger, sur le replat du coteau. Ici, le calcaire remonte vers l’est, sur le même profil caillouteux que sur le chêne. En revanche le sous-sol est marneux. On distingue plusieurs blocs dans cette parcelle : « les vignes à  » mimi, jean, cochet, millat… nommés d’après un ancien propriétaire ou celui qui à planté la vigne. Parmi ceux-ci, les vignes centenaires plantées par l’arrière grand père dont une partie est sélectionnée pour notre cuvée « Charleston ».
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Chapelle Saint-Trivier 0,5haNous distinguons généralement au sein de ce climat trois parcelles Pesselières 0,2ha,  Cordonières 0,1ha et Lie-Monin 0,2ha. Pesselières est la parcelle la plus calcaire du domaine. Ses calcaires blancs affleurants et son exposition aux vents dominants lui donnent un aspect austère. La terre elle-même est blanchie par la poussiére de calcaire qui se mélange aux limons. Jouxtant la chapelle de Quintaine, elle est orientée vers le Nord.
Cordonières est une de nos plus vieilles vignes parmi lesquelles nous sélectionnons nos greffons pour remplacer les pieds manquants. Elles est situées sous la Chapelle, orientée à l’Est.
La Lie-Monin avec son sol riche en argile rouge (ferrugineuse) est la parcelle dont est issue notre « Bulle ». Son sous-sol est constitué d’une sorte d’arène calcaire : calcaire en cours d’érosion comme un sable grossier avec des morceaux de quelques millimètres à quelques centimètres. Nous profitons du fait que notre Bulle est hors appellation (pas le droit à lAOC Crémant en méthode ancestrale) pour y replanter depuis 2015 des vieux cépages locaux oubliés (Gouais blanc, Plan Vert, différents types de Gamay, Roublot, Tressot, ec.)